L’Aventure de Mme Muir

The Ghost and Mrs. Muir

  • La piste aux étoiles

Fiche technique

Titre en VF
L'Aventure de Mme Muir
Titre en VO
The Ghost and Mrs. Muir
Année (copyright)
1947
Réalisateur(s) et acteurs principaux
Réalisateur Joseph L. Mankiewicz, Acteurs, Gene Tierney, Rex Harrison, George Sanders, Edna Best, Victoria Horne, Isobel Elsom, Robert Coote, Whitford Kane, Anna Lee, Vanessa Brown, Natalie Wood
Genre(s)
Comédie dramatique, Fantastique, Amour
Thématiques
Veufs et veuves, Fantômes, Marins, Au bord de l'eau, Amour au-delà de la mort, Séducteurs, Peintres et tableaux, Agents immobiliers, Londres, Angleterre victorienne, Compositeur Bernard Herrmann, Films de 1947
Pays de production
États-Unis
Durée
1 h 40 min
Résumé
Londres, au début du 20e siècle. Jeune et jolie veuve, vivant auprès de la mère et de la sœur de son défunt mari, Lucy Muir décide de quitter sa belle-famille, défiant les conventions sociales, pour mener une vie telle qu'elle l'entend. Malgré les mises en garde d'un agent immobilier, Lucy loue en bord de mer un petit cottage que l'on dit hanté par son ancien propriétaire, un capitaine de navire qui s'y serait suicidé. Après quelques heures sous son nouveau toit, la jeune femme rencontre effectivement le capitaine...
IMDB

Mon avis

Classique de l’âge d’or hollywoodien et premier film majeur dans la carrière de Mankiewicz. L’Aventure de Mme Muir est un conte fantastique et romantique, amusant et adorable à bien des égards, centré sur la rencontre entre une jeune veuve, libre, obstinée mais impressionnable, et le fantôme d’un capitaine de mer, misogyne, bourru et finalement… tendre. C’est probablement le film le plus émouvant du cinéaste qui conduit ici son récit avec intelligence, élégance et pudeur, faisant éclore un lyrisme délicat, en s’appuyant sur des dialogues de belle qualité littéraire, sur le charme des interprètes principaux (Gene Tierney, Rex Harrison, George Sanders), sur l’excellent travail photographique de Charles Lang, sur un montage qui cultive avec raffinement l’art de l’ellipse, sur la musique lyrique de Bernard Herrmann…

Ayant débuté au cinéma comme scénariste et dialoguiste, Mankiewicz fait la part la plus belle, dans son art, aux joutes verbales. Si l’on met de côté un sexisme d’époque qui empèse certaines tirades, on trouve dans le texte quelques pépites qui célèbrent la puissance de l’imaginaire et de l’amour. Ainsi s’exprime le capitaine, mélancolique, un matin, avant de s’effacer pour mieux laisser vivre celle qu’il aime : « Lucia, écoute-moi. Écoute, ma chérie. Tu as rêvé. Tu as rêvé d’un marin qui hantait cette maison. Tu as rêvé des conversations que tu aurais eues avec lui, d’un livre que vous auriez écrit tous les deux… C’était un rêve, Lucia, et au matin et toutes les années suivantes, tu ne t’en souviendras que comme d’un rêve. Et il mourra comme tous les rêves au moment du réveil. Comme tu aurais aimé le cap Nord et les fjords sous le soleil de minuit, naviguer au-delà des récifs des Barbades où les eaux bleues tournent eu vert. Les Falklands où le vent du Sud souffle et fouette les vagues blanches d’écume. Que de choses nous avons perdues, Lucia, que de choses nous avons perdues tous les deux. Adieu, mon amour. » Autre pépite, dans un autre registre, ironique et caustique, et dans la bouche du personnage de Miles Fairley (George Sanders) contemplant la pluie londonienne : « Il est facile de comprendre pourquoi les plus beaux poèmes sur l’Angleterre au printemps ont été écrits en Italie pendant l’été. » C’est ce dernier registre, plein d’un esprit piquant, que Mankiewicz développera dans bon nombre de ses films suivants, le poussant parfois jusqu’au cynisme et au pessimisme.

Mais restons encore un peu sur cette Aventure de Mme Muir avec quelques remarques sur sa tonalité fantastique et son casting. Parmi les motifs caractéristiques du genre, on trouve celui du tableau qui impressionne et fascine, motif classique en littérature fantastique et récurrent dans plusieurs films de l’époque (Le Portrait de Dorian Gray, Laura, La Femme au portrait…). Quant aux effets visuels, ils sont ici simples et efficaces, essentiellement basés sur des jeux d’ombre et de lumière, de présence et d’absence, moins ouatés et plus sobres, en tout cas, que dans Peter Ibbetson (Henry Hathaway, 1935), autre film ayant pour sujet l’amour au-delà de la mort. On note enfin la présence à l’écran de Natalie Wood, alors âgée de 9 ans, dans le rôle d’Anna enfant (la fille de Lucy).

Cf. Le Cinéma fantastique, de Patrick Brion, éditions de La Martinière.

Frédéric Viaux (film vu le 11/09/1993, revu le 02/05/2022)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *