Nelly et Monsieur Arnaud
Nelly et Monsieur Arnaud
Fiche technique
Mon avis
Comme le titre le suggère, le film repose essentiellement sur deux portraits, celui de Nelly et celui de Monsieur Arnaud, et sur l’histoire de leur rencontre. D’un côté : une jeune femme fatiguée, lasse de trimer à droite et à gauche, lasse de son mari inactif, et qui décide de larguer les amarres (Emmanuelle Béart convaincante dans un rôle frémissant, écrit sur mesure par Claude Sautet). De l’autre côté : un vieil homme fortuné, dont le passé entre ministère de la Justice et milieu des affaires comporte certaines zones d’ombre ; un vieil homme au regard perçant, aux manières polies mais froides, à l’esprit caustique et misanthrope (Michel Serrault, parfait, dans l’un de ses meilleurs rôles au cinéma). Entre ces deux êtres pas vraiment destinés à se côtoyer se tisse un lien intime et intense. Une relation troublante, nourrie de curiosité, de fascination, de vraies-fausses confidences, d’amour, d’amitié… Un attachement assez indicible, qui donne au récit son originalité, sa richesse, sa complexité.
Claude Sautet déploie cette chronique sentimentale, traversée d’une belle émotion souterraine, avec sa science habituelle : une mise en scène précise et sobre, relayée par des dialogues et une interprétation ad hoc. Le rythme est peut-être un peu lent, mais tout dans ce film est intelligemment et sensiblement posé, en équilibre subtil entre le « très écrit » et le « non dit ». Ce dernier long-métrage de Claude Sautet trouve son charme dans son mystère sentimental et sa pertinence dans un certain tableau de la solitude et de la communication modernes. Il rappelle l’obsession de l’auteur à dépeindre des cœurs en hiver. Mais aussi son goût pour une sensualité mélancolique, via une très belle scène de chambre, dans la pénombre, au cours de laquelle Monsieur Arnaud regarde Nelly dormir, dévoilant son dos nu (comme le personnage de Romy Schneider dévoilait le sien dans Les Choses de la vie).
Prix Louis-Delluc 1995. César 1996 du meilleur réalisateur et du meilleur acteur. Musique : Philippe Sarde.
Frédéric Viaux (film vu le 12/02/1996, revu le 07/05/2014)