8 1/2 – Huit et demi
8 1/2 - Otto e mezzo
Fiche technique
Mon avis
Voici un classique qui n’a rien de classique. Avec ce film, Fellini rompt définitivement avec le néoréalisme de ses débuts et laisse libre cours à une imagination plus baroque, plus fantasmatique. Il met en images la confusion qui règne dans la tête d’un cinéaste impuissant, son double. Trois ans après La Dolce Vita, le réalisateur traversait effectivement un désert créatif. Son talent, paradoxal, a été de trouver l’inspiration dans ce manque d’inspiration, de faire un film sur l’incapacité à faire un film… Mise en abyme et autobiographie. Fellini zappe entre réalité et imaginaire. La présence, soûlante et parasite, de son entourage se mêle aux cauchemars et hallucinations. Les visions du passé, les problèmes de couple, les vérités et mensonges, les grandes questions sur l’art, la politique, la religion se fondent en un maelström d’angoisse, de culpabilité, de lassitude. Il y a là une virtuosité tournoyante, bien servie par un superbe noir et blanc, et bien accompagnée par la célèbre musique de Nino Rota. Mais le principe même de narration, débridé, est aussi particulièrement déroutant. Si l’on est saisi par les cauchemars du début, admiratif devant la scène du harem, amusé par la représentation du désir sexuel (femme-monstre, plus que plantureuse), il n’en est pas moins difficile de ne pas se perdre et de ne pas lâcher prise, parfois, sur la longueur.
Oscar du meilleur film étranger en 1964. Fellini a reçu cette récompense pour la troisième fois, après La Strada et Les Nuits de Cabiria.
Pourquoi ce titre, 8 1/2 ? C’est en fait un non-titre, illustration du manque d’inspiration de l’auteur et de son personnage… Le cinéaste a compté ses films précédents et a décrété que celui-ci était son huitième et demi (le demi étant constitué par ses sketches inclus dans L’Amour à la ville et Boccace 70).
Dans le casting, on trouve notamment Barbara Steele, au visage étrangement découpé, qui s’est fait un nom dans le cinéma d’épouvante (Le Masque du démon, de Mario Bava, La Chambre des tortures, de Roger Corman, etc.). Et surtout Claudia Cardinale, d’une beauté à tomber par terre. C’est la première fois, dans ce film, qu’elle joue avec sa voix naturelle, sans être doublée. Les producteurs de l’époque n’aimaient ni sa voix grave, ni son accent français…
Frédéric Viaux (film vu le 18/03/1995, revu le 27/03/2010)