Bruno Reidal – Confession d’un meurtrier
Bruno Reidal – Confession d’un meurtrier
Fiche technique
Mon avis
Brutal et subtil, glaçant et touchant, ce premier long-métrage – étonnant de maîtrise et de puissance – sonde des abîmes humains horriblement tourmentés et laisse dans un état de sidération, de fascination et de trouble. L’histoire relate un fait divers, crime monstrueux, et brosse le portrait du criminel, à la lumière des Mémoires qu’on lui a demandé d’écrire. La reconstitution visuelle, d’un réalisme factuel, opérée avec un sens austère et cru de l’essentiel, semble guidée par la seule voix du protagoniste principal. On est immergé dans une conscience et dans des souvenirs, sans interférence d’un jugement extérieur, ni de la part des personnages auditeurs de la confession, ni de la part du cinéaste qui opte pour une distance éthique louable. On écoute la voix de Bruno Reidal, donc. Son phrasé limpide et fluide, d’une belle qualité littéraire. Son récit d’une franchise confondante. Sa façon d’exposer simplement et précisément ses conflits entre raison et pulsion irrépressible, de détailler névrose et psychopathie. Le film donne à entendre l’intelligence derrière la folie criminelle, la lucidité derrière le sadisme (« Quoi que je fasse, les scènes de meurtre sont pour moi pleines de charme »). Et la matière du discours, certes déstabilisante, est passionnante sur un plan dramatique, psychanalytique, philosophique. Matière pétrie de désir, de jalousie et de frustration, de satisfaction et d’ennui, de religion et de culpabilité, et qui lie fondamentalement le meurtre à la jouissance sexuelle. Tout dans ce film est d’une justesse au millimètre : narration, mise en scène, montage, interprétation (Dimitri Doré et Jean-Luc Vincent en tête). Sur un plan thématique et/ou stylistique, on songe au film de René Allio : Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère… On songe aussi à Robert Bresson. Ou à Georges Bernanos, côté littérature. Et puis au final, on ne songe plus qu’à Bruno Reidal. Qui laissera un souvenir impérissable.
Frédéric Viaux (film vu le 28/03/2022)