Coup de torchon
Coup de torchon
Fiche technique
Mon avis
C’est l’un des meilleurs films de Bertrand Tavernier. À l’origine, il y a un roman de Jim Thompson, intitulé en français “1 275 âmes”, dont l’action se déroule dans le sud des États-Unis. Action transposée par Tavernier et Aurenche (coscénaristes) dans l’Afrique coloniale d’avant Seconde Guerre mondiale. Transposition intelligente. À la clé : un tableau critique de la société coloniale française, avec son racisme ordinaire (“les Nègres n’ont pas d’âme”), ses abus de pouvoir, son insouciance parfois abjecte. Et surtout un ton unique, mélange d’humour noir, de truculence désabusée et d’insolence en douce, cruellement vacharde. Coup de torchon est un jeu de massacre à la fois lucide et fou, orchestré par un personnage qui porte cette ambivalence : le flic Cordier, qui passe volontiers pour un gentil con naïf, se venge gentiment de ceux qui l’ont humilié et s’attaque par la même occasion à quelques dignes représentants de la bêtise, de l’arrogance et de la violence humaines, motivé par un mysticisme justicier qui trouble les notions de bien et de mal. Tel un ange exterminateur au regard doux et au cynisme désarmant, Cordier parle au nom de Jésus-Christ et pourfend implacablement la médiocrité incarnée. Son interprète, Philippe Noiret, est parfait ; il tient là l’un de ses plus grands rôles. Le reste du casting est par ailleurs remarquable. Mention spéciale à Jean-Pierre Marielle qui campe délicieusement deux personnages.
Bien reçu par le public lors de sa sortie, ce film a été moins bien accueilli par les critiques et les professionnels du cinéma (aucun César décerné), qui ont été peu sensibles à son ton décapant et à son ambiguïté. Musique : Philippe Sarde. Décors : Alexandre Trauner.
Frédéric Viaux (film vu le 10/09/1994, revu le 06/01/2015)