De l’autre côté du vent
The Other Side of the Wind
Fiche technique
Mon avis
C’est le dernier film d’Orson Welles, coécrit avec sa dernière épouse (Oja Kodar, qui joue « l’actrice » dans le film). Le tournage, partiel, a eu lieu dans les années 1970, maintes fois interrompu, abandonné et donc resté inachevé à la mort du cinéaste en 1985. Les rushs et les premiers essais de montage ont été repris 40 ans plus tard par Peter Bogdanovich, ami de Welles, réalisateur, également acteur dans le film. Cette post-production posthume a été guidée par les notes de Welles, ses recommandations à Bogdanovich. Et c’est finalement Netflix, à la recherche d’œuvres de prestige, qui a diffusé le film abouti en 2018.
Peter Bogdanovich a ainsi relevé un défi monstre en essayant de mettre de l’ordre dans un matériel touffu et disparate : mises en scène de discussions à bâtons rompus, d’interviews, de témoignages ponctués d’aphorismes, petites scènes filmées à l’arrache, séquences stylisées, couleur, noir et blanc… Au niveau du fil narratif, ça passe assez bien, si l’on accepte un zapping permanent, et même si tout n’est pas limpide. Mais au niveau du rythme, c’est plus problématique : le montage speed, avec beaucoup de plans courts, donnent 2 heures de dialogues à la volée et de chaos stylistique. C’est stimulant au début, puis malheureusement un peu soûlant et assommant, pour un résultat original et inclassable, certes, mais aussi très bavard et prétentieux.
Au demeurant, ce film au joli titre, poétique, n’est pas inintéressant au regard de l’œuvre globale et de la vie d’Orson Welles, dans la mesure où c’est un évident miroir que le réalisateur se tend ici à lui-même. Il y a beaucoup d’éléments autobiographiques dans ce portrait d’un cinéaste sur le retour, créateur et destructeur, incontrôlable et despotique selon certains, ne trouvant plus de producteur pour le suivre sur des projets sans scénario, ruiné mais toujours en mouvement… Le film vaut enfin pour ses différents niveaux de mise en abyme, notamment pour le film dans le film, au style seventies intrigant, qui fait vaguement songer à Zabriskie Point d’Antonioni.
Musique : Michel Legrand.
Frédéric Viaux (film vu le 25/03/2020)