L’Obsession de Madame Craig
Craig's Wife
Fiche technique
Mon avis
Ce portrait de femme au foyer despotique a de quoi surprendre à une époque (les années 1930) de forte domination masculine. Portrait original, donc, mais aussi cinglant. On pourrait presque le taxer de misogynie si ce n’était pas une femme qui était aux commandes du film… Cette femme, Dorothy Arzner, est connue pour avoir été l’une des premières réalisatrices aux États-Unis et la seule femme de l’âge d’or hollywoodien à se voir confier des mises en scène par les studios. Voilà qui aujourd’hui, a priori, fait sa notoriété plus que la qualité globale de son œuvre (une quinzaine de films tournés entre 1927 et 1943). Mais cette œuvre est peut-être à redécouvrir ou à découvrir tout court, du moins en France où elle est en partie inédite. Quoi qu’il en soit, Dorothy Arzner n’a pas profité de ce film et de sa position pour servir la cause féminine. Son personnage principal, avec sa stratégie arriviste, sa posture hautaine, son obsession de l’ordre et de la bienséance sociale, son absence de sentiment, apparaît bien peu sympathique. Dorothy Arzner la croque avec un savoir-faire certain et une sensibilité caustique plaisante. Dommage qu’elle ne se défasse pas davantage du caractère démonstratif d’un scénario qui trouve un point d’orgue bien moralisateur. Outre ce côté édifiant et quelques invraisemblances (la réaction finale du mari ne semble guère crédible dans la société de l’époque), on peut aussi juger que le titre original n’est pas très bien choisi. « Craig’s Wife » présente seulement le personnage central comme la femme de Craig, dans un lien d’appartenance. Or ce personnage est évidemment bien plus que cela et c’est plutôt le mari qui appartient à sa femme dominatrice… Au final, on gardera de l’ensemble le souvenir d’un honnête drame domestique, plutôt piquant et parfois jubilatoire dans certains retournements de situation.
D’après une pièce de George Kelly.
Frédéric Viaux (film vu le 22/09/2014)