Le capitaine Volkonogov s’est échappé
Kapitan Volkonogov bezhal
Fiche technique
Mon avis
Le capitaine Volkonogov s’est échappé. Un titre en VF qui renvoie au film de Bresson, Un condamné à mort s’est échappé. Parenté de titres et de thèmes : condamnations à mort, lignes de fuite… Mais contextes différents, évidemment. Le scénario de ce film trouve son ancrage dans l’URSS de Staline, avant la Seconde Guerre mondiale, lors d’une des purges opérées par le parti au pouvoir. À l’écran, ce contexte est rendu avec un réalisme stressant et une pointe de décalage, aux accents parfois fantastiques, dans des décors parfois impressionnants de fin du monde. Les protagonistes sont campés par des interprètes tout aussi impressionnants (Yuriy Borisov – Compartiment n° 6 ; Timofey Tribuntsev – La Fièvre de Petrov ; Maxim Stoyanov – Give Me Liberty…).
Natalya Merkulova et Alexey Chupov, les réalisateurs russes (exilés), saisissent leur sujet frontalement. Ils excellent, dans un style dur, froid et rythmé, à dépeindre un climat de terreur, de délation et d’absurdité. Même si on aurait apprécié un petit topo, au début, pour mieux situer et comprendre ce moment de l’histoire russe, le principe de la répression fasciste – son cynisme et sa folie – est bien décortiqué. Dans le film, un des personnages explique clairement que les innocents actuels sont des traîtres ou des espions en devenir ; ils sont à éliminer préventivement, en leur faisant avouer n’importe quel crime. Car à chaque châtiment doit correspondre un crime dans un État de droit… Ce principe valant pour le peuple vaut aussi pour la police chargée d’appliquer ce principe…
L’une des qualités du scénario tient dans cette démonstration terrible. Une autre tient dans l’humanisation du personnage principal, qui était jusque-là le vecteur déshumanisé d’une idéologie totalitaire. Humanisation par la peur et le désir de rédemption. Cette rédemption (qui peut paraître naïve) étant cherchée successivement auprès de différents personnages, le scénario se répète alors un peu, mais c’est un choix de narration. En tout cas, l’intensité dramatique demeure constante dans cette quête personnelle sur fond de course-poursuite. Avec un regard toujours acéré sur le totalitarisme stalinien en particulier, et le fascisme en général.
Frédéric Viaux (film vu le 04/04/2023)