Serre moi fort
Serre moi fort
Fiche technique
Mon avis
À l’origine, il y a une pièce de théâtre de Claudine Galea, Je reviens de loin. Mathieu Amalric en a tiré un excellent scénario puzzle – mystérieux, beau et douloureux – qui épouse la subjectivité du personnage féminin central, mêlant sans frontières bien distinctes le passé, le présent et le futur, la réalité et l’imaginaire, les vivants et les morts. Remarquable travail de montage – image et son – pour donner forme à cette matière subjective, incertaine, pour laisser deviner une ligne de fuite, en zigzag. Après quelques dizaines de minutes (peut-être Amalric aurait-il pu maintenir l’ambiguïté plus longtemps), on comprend ce que l’héroïne a vécu et ce qu’elle invente. On avance alors avec elle, au cœur de sa dépression, au bord de la folie. Le film évoque joliment le recours à l’imagination pour continuer à vivre avec une souffrance indépassable, pour survivre. L’actrice Vicky Krieps, formidable, porte l’histoire sur ses épaules et sur son beau visage ravagé. Cependant, malgré toutes ces qualités, le film peine à diffuser fortement l’émotion. Est-ce le morcellement narratif, le zapping permanent entre différentes strates de vie ou l’approche mentale qui empêchent le flot émotionnel de se déverser pleinement ? Quoi qu’il en soit, l’inspiration est belle et originale. Il y a beaucoup de cinéma et de subtilité dans chaque détail du film. Jusque dans l’écriture du titre, où l’absence de trait d’union entre « Serre » et « moi » a son importance symbolique.
Frédéric Viaux (film vu le 14/09/2021)