La Prisonnière du désert
The Searchers
Fiche technique
Mon avis
La Prisonnière du désert, c’est avant tout une leçon de réalisation classique qui donne à la fois dans l’ampleur et dans l’intimisme, captant aussi bien les décors grandioses de Monument Valley (en Technicolor et Vistavision) que les petits gestes qui disent beaucoup. Le film s’ouvre avec un mouvement de caméra qui va de l’intérieur d’une maison vers l’extérieur, et se clôt par un mouvement inverse, avec une grande élégance en matière de poétique des espaces. Derrière la caméra, John Ford alterne par ailleurs des approches simples, frontales, et d’autres plus subtiles ou pudiques, via le hors-champ. Du hors-champ, il y en a aussi beaucoup dans l’histoire et le portrait d’Ethan Edwards, le personnage principal incarné par John Wayne. Entre autres non-dits et zones d’ombre : qu’a-t-il fait entre la fin de la guerre de Sécession et le moment où il entre en scène ? Comment connaît-il aussi bien les us et coutumes indiennes ? D’où vient sa haine profonde à l’égard des Indiens ? On ne le saura pas. Sa caractérisation est assez ambigüe. D’un côté : individualisme, racisme, violence, extrémisme. De l’autre : abnégation héroïque. Ethan Edwards est un homme déterminé à sacrifier sa nièce – qu’il estime « perdue » car tombée entre les mains des Indiens – et capable d’un revirement qui apparaît un peu plaqué. Le regard de Ford sur ce personnage laisse assez perplexe, quand bien même on peut louer son refus du manichéisme. Trouble et amer, laissant de côté le point de vue de la captive et la question finale de sa « réadaptation », ce film n’apparaît pas forcément comme le plus exaltant ou le plus abouti de son auteur (en tout cas sur le fond), même s’il traverse le temps en demeurant l’un de ses plus connus et appréciés. On peut largement lui préférer Les Raisins de la colère ou L’Homme qui tua Liberty Valance.
Musique : Max Steiner.
Frédéric Viaux (film vu le 31/12/1995, revu le 21/09/2021)