Tár

Tár

  • La piste aux étoiles

Fiche technique

Titre en VF
Tár
Titre en VO
Tár
Année (copyright)
2022
Réalisateur(s) et acteurs principaux
Réalisateur Todd Field, Acteurs, Cate Blanchett, Nina Hoss, Noémie Merlant, Sophie Kauer, Mark Strong, Julian Glover, Allan Corduner, Adam Gopnik
Genre(s)
Drame
Thématiques
Musique et musiciens, Femmes de pouvoir, Maîtres et serviteurs, Harcèlement, Pulsions suicidaires, Amours lesbiennes, Grandeur et décadence, Berlin, Films de 2022
Pays de production
États-Unis
Durée
2 h 40 min
Résumé
Lydia Tár, cheffe de l'Orchestre philarmonique de Berlin, est au sommet de la gloire. Elle donne interviews et masterclasses à tour de bras, s'apprête à diriger la Symphonie n° 5 de Mahler et à publier son autobiographie. Mais quelques événements et révélations vont mettre au jour ses abus de pouvoir, ses relations troubles. Et enrayer la mécanique du succès.
IMDB

Mon avis

Un film dur, froid et implacable, à l’image du personnage principal. Un film qui prend d’ailleurs pour titre le nom de ce personnage. Pas le prénom, c’eût été trop sympathique (et ni le personnage, ni le film le sont). Pas le prénom et le nom, c’eût été trop classique (et le film ne l’est pas). Juste le nom, Tár, une syllabe comme une percussion sourde qui, à l’écrit, se transforme en « Rat » si l’on inverse l’ordre des lettres.

Dur et froid sont aussi des qualificatifs qui valent pour l’environnement du personnage : l’architecture brutaliste de son appartement ; le métal chromé de sa voiture de luxe… Autant d’écrins cohérents pour une femme qui s’impose comme un bloc d’assurance et de suffisance. Femme-artiste-despote, sûre de son talent et de sa toute-puissance (voir la superbe affiche du film), cultivant la relation maître-serviteur avec un art impitoyable de la manipulation.

Todd Field, réalisateur à la filmographie courte et clairsemée, muet au cinéma depuis le très bon Little Children (2006), propose un récit et un portrait qui s’inscrivent à la fois dans un type de dramaturgie antique (hubris, déchéance, ironie tragique) et dans une forte contemporanéité (abus de pouvoir, fulgurance des ascensions et des chutes sociales, importance des nouveaux modes de communication…). En choisissant un personnage féminin pour étayer son propos, il va à contre-courant des critiques actuelles d’une masculinité toxique et abusivement dominante, préférant dépasser la question des genres pour focaliser sur des situations et des actes.

Tout le film est basé sur des choix audacieux, concrétisés avec une intelligence et une précision redoutables. Choix de dérouter les spectateurs, de crédibiliser à fond les personnages, de créer un inconfort voire un malaise permanents. Ça commence par des scènes très longues, très intellos, très « jargonnantes », qui permettent, de manière perfectionniste, de poser le personnage principal dans sa réalité quotidienne. Puis s’opère un régulier et minutieux dérèglement de ce quotidien, via une inspiration qui s’éloigne du réalisme pour lorgner vers une inquiétante étrangeté. Un cri dans la forêt et autres sons domestiques perturbants. Changement de ton. Tout bascule. Changement de rythme. La dernière partie du film est plus elliptique, constituée de séquences courtes et tranchantes.

La radicalité du fond et la maîtrise de la forme impressionnent autant que la performance de Cate Blanchett : chaque regard, chaque intonation, chaque geste – le film est aussi, en soi, un documentaire sur son talent.

Festival de Venise 2022 : Prix d’interprétation féminine.

Frédéric Viaux (film vu le 30/01/2023)

Photo et bande-annonce

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *